(ELSIE VILLIDÓTTIR) forever is our today

[quel rapport a ton personnage à l'astrologie?] : C'est quelque chose à laquelle elle s'intéresse avec beaucoup de curiosité. Sans forcément y croire dur comme fer, elle trouve qu'il est parfois bon d'y porter attention pour s'éclairer soi-même. De plus, elle y voit un lien assez fort avec l'astronomie, qui est un domaine fascinant pour elle.
C'était dur à assimiler, autant pour elle que pour son cadet. Seize et treize ans qu'ils avaient, les deux gamins. Droits comme des piquets, les doigts entrelacés, le regard posé sur le coffret en bois. Leur père posté derrière eux, le visage pâle et l'air dévasté. Il n'y avait pas un bruit qui fendait l'air, malgré les autres personnes présentes. Seulement le vent pour venir s'engouffrer dans le caveau familial que leur mère allait rejoindre. Au moins serait-elle toujours là, au fin fond du domaine, dans cette maisonnette de pierres qui était désormais son nouvel abri. Tous avaient vu venir son décès, mais la réalité semblait bien plus rude que chacun ne se l'était imaginée. Son cœur avait encore fait des siennes, avant de lâcher. On leur avait assuré que cela avait été si brusque que leur mère n'avait sans doute rien senti.  

Depuis la fenêtre de sa chambre, Elsie observait comme elle le pouvait le bout du terrain, trop immense pour qu'elle ne le distingue réellement. Ce n'était que le moyen de s'imaginer la plus proche possible de sa mère. Heureusement, il lui restait son père, Villi et son frère, Hermann. Et l'intruse qui avait passé les portes depuis quelques jours. Elsie ne s'était jamais sentie aussi profondément agacée qu'elle ne l'était ces temps-ci. Elle détestait cette partie désagréable d'elle-même, mais c'était plus fort qu'elle. Elle refusait de comprendre comment son père acceptait de remplacer si facilement son ancienne épouse, décédée depuis si peu. Surtout pour une femme aussi froide et insipide que l'était cette Agata. Elsie connaissait toute la pression mise sur son paternel par ses propres parents. Faire partie d'une famille si influente, si traditionnelle, lui imposait certaines choses, qu'elle-même subissait en partie. L'éducation à la maison, son père souvent parti aux quatre coins du monde, des repas longs et à l'ambiance assez stricte... Elle y avait toujours participé sans broncher, même si elle n'était pas sûre de supporter ce qui viendrait dans quelques temps. Elle serait bientôt majeure, entrerait dans ses études et il lui faudrait alors suivre cette voie toute tracée qu'on souhaitait pour elle. Un mari aussi influent et bon parti que possible, une carrière parmi les plus rentables : droit, politique, recherches... Rien de ce qui ne l'intéressait vraiment, elle qui avait la tête dans ses bouquins, par-dessus son violon qu'elle n'osait reposer, comme si elle quittait sa mère par la même occasion. A choisir, elle savait ce qu'elle voulait faire : travailler dans une librairie et écrire ses propres livres. Oh, ce n'était pas comme si elle n'avait pas commencé. Comme un déclic, elle n'arrivait plus à s'arrêter d'écrire depuis la mort de sa mère. Mais elle supportait avec de plus en plus de mal l'air étouffant des pièces de la maison, qu'elle avait toujours tant aimée.

Elle avait participé au remariage de son père sans le moindre enthousiasme. Hermann ne s'y était pas présenté. Elle le comprenait, la brune, mais en tant qu'aînée, elle se voyait mal fuir certaines de ses responsabilités.

Pourtant, ce fut bien son petit frère qui remit en cause son idée de s'effacer et de suivre la voie de sa famille. A tout juste dix-sept ans, il prit sa valise et ses affaires et il disparut. Elsie, qui n'avait pas encore vingt ans, se sentit plus que secouée de voir qu'il avait eu le courage de prendre une décision qu'elle se voyait mal prendre. Pourtant, c'était une idée qu'elle avait envisagée dans ses désirs les plus secrets. Fuir et entamer une vie qui lui plairait vraiment. A la fois elle s'en voulait d'avance de faire ce coup à son père qui se faisait déjà un sang d'encre pour Hermann qui avait mystérieusement réussi à effacer toutes ses traces, mais d'un autre côté, les premières discussions de mariage lui donnaient la nausée. Une véritable nausée, quelques étourdissements, tant et si bien qu'elle se posa quelques questions. Sans rien en dire, elle consulta son médecin, fit quelques examens et la nouvelle tomba : son cœur était aussi instable que celui de sa mère. Arythmie ventriculaire, qu'on lui expliqua. Pas toujours grave, mais à ne pas prendre à la légère. Après tout, c'était ce qui avait mené sa mère sous terre...

Alors, Elsie prit sa décision. Quelques jours plus tard, elle montait dans un bus en direction de la capitale, valise et sac en main.

Elle improvisa sa vie là-bas, espérant y retrouver son frère autant qu'un futur qui la tentait réellement, qui lui permettrait de ne rien regretter si les choses se gâtaient pour elle. Elle décida de se projeter au plus proche, d'oublier qu'il y avait des tas d'années incertaines qui se profilaient. Elle dénicha d'abord un petit job de serveuse puis, avec le temps, elle s'ouvrit à ce qu'elle voulait vraiment faire. Elle se fit engagée dans une librairie puis elle envoya le premier jet d'un de ses romans à une maison d'édition. Aussi étonnée fut-elle, elle n'eut aucun mal à obtenir un contrat, ni à envoyer les romans suivants qu'on lui demandait avec impatience.

Le nom sur cette couverture n'était pas celui qu'elle portait mais cela n'empêcha en rien sa famille de la retrouver. Pas comme si elle désirait vraiment se cacher. Elle était restée Elsie malgré sa fuite, mais elle était assez majeure pour décider de son avenir. Rien de ce que son père chercha à lui dire ne la fit changer d'avis et elle comprit bien que malgré sa tristesse de les avoir vus partir, il restait fier de la vie qu'elle avait commencé à se construire. Hermann, lui, était resté invisible et introuvable, même pour Elsie. Alors, elle lâcha peu à peu l'affaire, espérant simplement que le destin le remette sur sa route un peu plus tard, quand tout irait encore bien. Elle essaya d'oublier que les choses pouvaient aller mal pour elle.

Elle trouva un rythme qui lui plaisait, un quotidien qui lui correspondait. Des journées passionnantes à la librairie, qu'elle commença à terminer régulièrement dans un café où elle sortait de quoi écrire encore un peu plus qu'elle ne le faisait chez elle.
De quoi la pousser un peu vers de nouvelles têtes, de nouvelles discussions, qui lui faisait un peu oublié la perte de sa mère, son départ précipité et le silence-radio de son petit frère. Elle ne savait pas bien comment son père avait pu tenir le reste de sa famille à l'écart de sa vie, mais elle ne fut plus jamais dérangée dans ce qu'elle entreprenait.

Elle se laissa alors aller à ce qu'elle connaissait mal. Les amitiés, la sociabilité. Un peu comme avec Nikolai, qui tenait ce coffee shop où elle allait si souvent. Un cœur qui pour une fois palpitait pour d'autres raisons que son arythmie. C'était léger, les prémisses. Elle ne savait pas si c'était une bonne chose, pour elle qui ne savait pas où elle allait, pour elle qui ne connaissait pas grand chose à l'amour.

Elle n'en resta pas moins proche de lui, assez pour connaître son allergie. De quoi lui sauver la mise quand elle le vit s'écrouler à une fête où ils se trouvaient tous les deux. Un coup au cœur qu'elle avait eu, à le voir inconscient par terre, comme elle l'avait connu avec sa mère, et son frère, allergique aux arachides. Quelque chose dont elle avait l'habitude et qui lui permit de le sauver.

Elle n'arrivait pas vraiment à savoir si le regard de Nikolai avait changé et si cela n'était que dû à cette soirée. elle faisait mal confiance à son jugement, parce qu'elle n'y connaissait rien. Alors elle tentait de balayer ses idées pour éviter d'être déçue alors qu'elle commençait seulement à se sentir vivre pour elle-même.